Ciné-conférence Explorations dans la chaîne Trans Alaï, 3 février 2024, Forum des images, Paris 1er




3 et 4 novembre. Coyhaique


Coyhaique. Préparation logistique. Marche, animations traditionnelles, jineteadas ou rodéo gaucho. 

Mon petit ordinateur m’a lâché, je suis donc contraint d’aller taper mes textes dans un centre internet, sur des claviers bien endommagés, et adaptés à la langue espagnole… pas vraiment commode, heureusement Véronique relit et met les accents. Cela me rappelle des expéditions passées. 

Vendredi 3 novembre.

Ambiance de fête dans la petite ville de Coyhaique, petite ville où il fait bon  vivre. Le propriétaire de l’appartement où nous nous trouvons depuis lundi, avec qui je prenais le traditionnel maté, me disait qu’à Coyhaique on ne doit pas être pressé, mais toujours calme, c’est une règle de vie qu’il faut respecter, à défaut on n’y survit pas. Et cela se ressent bien.

Coyhaique est sous le soleil. Sur la place centrale, il y a foule, une fête est organisée par la municipalité et la région. De nombreux stands très propres sont disposés sous de petites tentes blanches, dans les allées entourées d’arbres. Des artisans très souriants et sympathiques vendent des produits artisanaux locaux, et aussi culinaires, tel le « mote con huesillo », une boisson chilienne sucrée, faite avec des grains de blé et des abricots secs.  

Un groupe de trois gauchos présente un concert de chants traditionnels, accompagnés par leur guitare, qui est souvent la compagne du solitaire gaucho. Ils sont habillés de leur habituelle tenue vestimentaire, deux ont des bottes en cuir, le troisième des espadrilles, autour de la taille une ceinture en laine et un ceinturon décoré d’une boucle argentée et de pièces de monnaie, une veste, un gilet court, un béret et leur emblématique poignard.

 

Les gauchos sont les gardiens de troupeaux de la pampa sud-américaine d’Argentine, d’Uruguay, du Paraguay, du sud du Brésil et du Chili. Au Chili, on l’appelle aussi le huaso ; néanmoins, un Chilien me disait que le huaso se trouve plutôt au nord de la Patagonie, et il se différencie par sa tenue vestimentaire. Les premiers gauchos sont apparus lors de la colonisation par les Espagnols, ils étaient Espagnols ou métis d’Espagnols et d’Indiens. Ils chassaient le bétail avec leurs lassos et leurs boleadores (trois courroies terminées par des boules de pierres qui servaient à la fois à la chasse et à divers jeux), pour vendre leur viande et le cuir. Ils s’opposèrent aux Indiens qui refusaient la colonisation. Par la suite, ils furent employés au sein des grandes estancias, où ils assuraient le gardiennage des troupeaux, leur abattage, le dressage des chevaux, et aussi le travail du cuir. Lors des guerres d’indépendance au XIXe siècle, ils se mettent au service des armées de libération, démontrant d’exceptionnelles qualités de cavalier et d’éclaireur, et ils acquirent ainsi leurs lettres de noblesse. Le nom gaucho viendrait du mot huachu en langue quechua, qui signifie orphelin ou vagabond. En effet, épris de liberté, le gaucho mène une vie solitaire dans la pampa, dormant à la belle étoile, et se nourrissant de viande grillée et aussi, selon un rituel très précis, de maté. La culture du gaucho se trouve dans son travail du bétail, mais aussi dans sa manière de vivre, sa tenue vestimentaire, et ses distractions. Aujourd’hui, avec ses valeurs de courage, d’honneur et de liberté en bandoulière, le gaucho fait toujours figure de mythe dans l’imaginaire sud-américain. Je peux d’ailleurs le constater lors de ce concert de chants traditionnels à Coyhaique, et surtout le lendemain lors du rodéo chilien, ou jineteadas, auquel j’ai pu assister.

Samedi 4 novembre.

Très belle journée sous le soleil. Toute une partie de la journée est consacrée à la préparation de la logistique de l’expédition, notamment à l’achat de vivres au supermarché de la ville, où on trouve quasiment tout, et à leur empaquetage.

L’après-midi, nous nous sommes rendus, avec la voiture de Gabriel, dans une grande prairie située juste à la sortie de la ville, à environ 5 kilomètres de la place centrale, pour assister à une jineteada, ou rodéo de gauchos. De jeunes, voire très jeunes, gauchos doivent monter un cheval non dressé, après l’avoir sellé alors qu’il est attaché à un poteau. Ils doivent rester en selle un temps bien précis, de quelques secondes, et ils sont jugés par un jury sur leur tenue en selle durant ce court laps de temps. Dans un décor paradisiaque de prairies et de montagnes aux sommets enneigés, ce fut une après-midi totalement dépaysante, et bien agréable, au milieu de nombreux gauchos vêtus de leurs traditionnels vêtements, des chevaux de Patagonie, et d’une foule venue pour assister aux prouesses des cavaliers juniors. Un beau moment de découverte des habitants de la région, et la rencontre d’un jeune Chilien, qui semble porteur de la trisomie, tout heureux que je lui donne mon ticket avec son numéro de loterie. Malheureusement je me heurte rapidement à la barrière de la langue. Une ambiance des plus familiales. Coyhaique, ville perdue au bout du monde, semble vivre hors du temps.